The Catholic Origins of Quebec’s Quiet Revolution, 1931-1970 – Michael Gauvreau

Dans cette étude d’histoire culturelle et religieuse, l’historien et professeur à l’Université McMaster, Michael Gauvreau, offre une perspective post-révisionniste sur les origines catholiques de la Révolution tranquille. L’Église catholique est présentée comme un acteur de premier plan dans le mouvement d’adoption des idéaux de la modernité. Loin d’être une institution uniquement ancrée dans la « tradition » et le conservatisme, l’Église et différentes associations religieuses auraient depuis les années 1930 participé à la mise en place de valeurs démocratiques et modernes au Québec[1]. La démonstration est construite à partir d’un imposant corpus de sources qui inclues le fonds d’archives de l’Action catholique (1930-1960), le journal Le Devoir, de revues religieuses telles que DominicaineMaintenant et Relations ainsi que des rapports gouvernementaux – Commission Parent, Dumont et Bill-60 –[2].

Plusieurs démonstrations effectuées par Gauvreau méritent d’être mentionnées. D’abord, la décennie 1930 au Québec marque un moment de rupture au sein de l’ordre catholique ultramontain. La jeunesse catholique, regroupée au sein de l’Action catholique, conteste le modèle hiérarchique et patriarcal de l’Église catholique[3]. Conscients qu’ils vivaient dans une société en plein changement et qu’il se développait un clivage intergénérationnel au sein de celle-ci, les dirigeants ont offert davantage de droits aux jeunes du regroupement : ils pouvaient notamment gérer l’association et détenaient un pouvoir décisionnel[4]. Gauvreau explique ce changement en raison de la prise de conscience par l’Église de l’impact de l’industrialisation sur les familles et les jeunes, notamment chez les classes ouvrières. Elle était consciente des changements sociétaux en cours et, dans l’intention de reconnecter les jeunes à la société et ses valeurs spirituelles, elle a fait preuve d’ouverture et non de conservatisme[5]. C’est là la première « concession » faite par l’Église catholique qui s’inscrit dans la mise en place de valeurs culturelles empreintes de modernité au Québec[6]. Qui plus est, Gauvreau met également beaucoup d’emphase sur l’influence du « personnalisme[7] » qui est un mouvement de la gauche française porté par Emmanuel Mounier. Ce courant aurait, selon l’historien, influencé la « révolution spirituelle » chez les jeunes de l’Action catholique[8]. D’ailleurs, ce serait cette génération de jeune, qui été formés dans les collèges classiques durant les décennies 1930 et 1940, qui aurait contribué à diffuser leurs idéaux religieux empreints de modernité chez les jeunes des classes ouvrières dans la société québécoise[9]. 

Parmi ces valeurs modernes qui sont mises de l’avant, Gauvreau postule que l’Église catholique québécoise s’est adaptée par rapport à plusieurs questions, dont celles du mariage, de la famille, du rôle des sexes dans la société et de la contraception. « In tandem with the spiritualized sexuality of the marriage preparation movement, écrit l’auteur, the promotion of « democratic » family relations by the Catholic Action movements was a key component of an attempt to reestablish intergenerational solidarities that many believed had been eroded by the cultural and social disruptions of Depression and wartime[10] ». Sur la question de la contraception, l’Église faisait la promotion de connaissances sur la « méthode rythmée » : 

During the so-called « sexual revolution » that followed when access to the birth control pill became widespread after the late 1960s, the rhythm method was much ridiculed as both ineffective and a symbol of women’s subjection to patriarchal clerical dogma. While it was later seen this way, it promotion by Catholic Action must be placed in the context of the period before 1960. Given the lack of access in Quebec to reliable means of birth control, as evinced by the prevalence before the Depression of practices such as long-term abstinence, coitus interruptus, and more « folkloric » expedients to prevent conception, knowledge of the rhythm method gave Catholic women, for the first time, a sense that they possessed the technical means, sanctioned by religion, to determine the timing of conception and thus, ultimately, the power to control the size of their families[11].

Enfin, la dernière contribution importante de l’ouvrage est de mettre en évidence le rôle de l’Église catholique dans les réformes de l’éducation durant les années 1960. La réforme de l’éducation, qui s’inscrit dans le cadre de la commission Parent sous le gouvernement de Jean Lesage, est souvent présentée comme une mesure qui s’inscrit contre l’Église catholique. Pour sa part, Gauvreau défend son antithèse. Elle aurait plutôt été le résultat d’une alliance renouvelée entre l’Église catholique et l’État québécois : « Roman Catholicism’s place in this new republican order was guaranteed by the explicitly confessional character of the ministry of education’s machinery. With Bill 60, Quebec had made a decisive choice, rejecting both secularization and religious fragmentation in the name of a single system which recognized both confessionality for the majority, and freedom of choice, so far as it was practicable at the local level, for minorities which chose to exercise their rights[12] ». Ainsi, non seulement l’Église catholique a été le porte-étendard de valeurs modernes mises de l’avant durant la Révolution tranquille depuis les années 1930, mais elle a également été un acteur de premier plan dans l’un des grands accomplissements de cette époque : la réforme du système d’éducation.


[1] Michael Gauvreau, The Catholic Origins of Quebec’s Quiet Revolution, 1931-1970, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2005, p.8-9.

[2] Ibid., p. 10. 

[3] Ibid., p. 14.

[4] Ibid., p. 21.

[5] Ibid., p. 23.

[6] Ibid., p. 33.

[7] Ibid., p. 45.

[8] Ibid.

[9] Ibid., p. 71. 

[10] Ibid., p. 109. 

[11] Ibid., p. 198-199. 

[12] Ibid., p. 301. 

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